Par: Dorsimont 19-12-2013
A l'heure ou l'expérience candidat fait l'actualité des RH, il est certainement temps de revenir aux fondamentaux d'un sujet qui nous tient particulièrement à cœur : la communication. En expert de la communication RH, Thomas Delorme, Vice President and Managing Director TMP Worldwilde, France, partage sa vision avec nous. |
Thomas Delorme, bonjour, être candidat est-il fastidieux ? Frustrant ? Ou les deux ?
Difficile de donner une règle, probablement un peu des deux. Je dirais que le processus devient de moins en moins fastidieux avec le temps, les entreprises faisant beaucoup d’efforts pour faciliter et fluidifier l’acte de candidature (depuis des terminaux mobiles, grâce à des profils ou des Cvs créés dans des applications tierces…).
L’époque du formulaire de candidature de 8 pages qui prend 1h30 à remplir est en train de disparaître.
Enfin on parle de tendances, pas nécessairement de la réalité vécue au quotidien qui peut rester fastidieuse.
Frustrant, probablement. L’afflux de candidatures dont beaucoup ne sont que peu ou pas réfléchies a diminué la capacité des entreprises à apporter une réponse rapide et argumentée aux candidatures qui, faute d’être retenues, avaient au moins la qualité d’être pertinentes. En résulte, j’en suis conscient, une frustration légitime.
Les sites carrières se ressemblent-ils tous ?
Malheureusement, trop.
On reproduit souvent ce qui se fait ailleurs en partant du principe que ce sont des « best practices ». Il s’agit la plupart du temps, de « common practices » qui n’apportent pas grand-chose et, surtout, qui ne permettent pas de marquer la différence ou la personnalité de l’entreprise qui communique.
Votre offre Talentbrew propose aux recruteurs de remédier à cela, qu'elles en sont les grandes composantes ?
Avec TalentBrew nous cherchons à permettre aux entreprises de décloisonner leurs offres d’emploi.
Le paradoxe étant que, sur un site Carrières, les offres d’emploi représentent généralement plus de 90% du volume de pages (et souvent 90% de son trafic) et pourtant, ce sont les rares pages pour lesquelles la présentation, l’ergonomie, la navigation ne sont pas optimisées. De plus, elles sont construites comme un silo, qui vit "à côté » des autres pages du site carrières sans jamais vraiment s’interfacer avec.
Nous cherchons pour chaque offre, à apporter, et ce de manière automatisée, des contenus qui permettront aux candidats de mieux se projeter dans l’entreprise et dans sa culture.
Nous travaillons aussi beaucoup sur le référencement des offres d’emploi sur les moteurs de recherche qui sont des pourvoyeurs majeurs de trafic et desquels, les offres des entreprises sont très souvent absentes.
Dans notre manuel de com préféré, il est question de qualités souhaitées, réelles et perçues. Quelles sont les attentes légitimes des talents d'aujourd'hui vis à vis de l’entreprise ?
Je pense qu’à force d’entendre qu’il ne fallait pas s’attendre à faire toute sa carrière dans une entreprise, nous avons fini par comprendre qu’il ne fallait pas faire sa carrière dans une entreprise.
Nous nous sommes persuadés que « les jeunes d’aujourd’hui ne veulent pas rester dans une même entreprise ». Je suis convaincu que ce n’est pas vrai, que, bien que la pression sociale à changer souvent soit forte : « comment, ça fait 4 ans que tu es dans la même entreprise ? », la plupart de nos fameux « jeunes » cherchent avant tout une entreprise dans laquelle ils se sentent bien, sur la durée.
Les critères qui font qu’on s’y « sentira bien » varient d’un individu à l’autre, chacun ayant ses priorités. C’est d’ailleurs là l’enjeu qui attend les entreprises quand on parle de la fameuse « marque employeur » : définir le « deal », le « donnant-donnant » que constituera le rapport employeur-employé. Il varie d’une entreprise à l’autre et il est important qu’à l’instar d’une rencontre amoureuse, la rencontre de recrutement se donne une chance d’être pérenne.
De manière assez récurrente, les attentes prioritaires sont néanmoins l’intérêt immédiat du job et le potentiel du "job d’après » (selon les études réalisées auprès des jeunes diplômés d’école de commerce et d’ingénieurs).
Ces dernières années, les jeunes se sont aussi montrés de moins en moins tolérants vis à vis des politiques informatiques des entreprises (PC et logiciels d’un autre âge, politique de sécurité et d’accès à internet infantilisantes), se déclarant même prêts à quitter ou à ne pas rejoindre une entreprise pour ces raisons. L’émergence du BYOD (Bring Your Own Device) est une réponse intéressante en ce sens.
Et les illégitimes ?
Il n’y a pas de demande ou d’attente illégitime, il n’y a que des entreprises qui ne sont pas susceptibles de les satisfaire, c’est là tout l’intérêt de la différentiation.
A l'heure du buzz et des haters, décevoir peut avoir des conséquences lourdes. Comment garantir la cohérence entre le discours et la réalité tout au long du processus du recrutement ?
En s’appuyant sur la réalité pour construire le discours !
Il y a 10 ans à peine, une entreprise pouvait raconter absolument n’importe quoi avec une chance assez minime d’être contredite par ceux vivant ou ayant vécu une expérience contraire.
Aujourd’hui, les réseaux sociaux et les moteurs de recherche ont tout changé.
Certes une expérience négative peut faire grand bruit mais si la dite expérience est exceptionnelle. Elle est désormais susceptible d’être contredite par une masse, de salariés, de candidats, d’anciens employés, qui cantonneront ces reproches au niveau de l’incident isolé. Nous sommes tous capables de faire la part des choses. Après tout, même les palaces n’ont pas 100% d’opinions positives sur tripadvisor. L’important reste de ne pas « marketer » le Crillon comme un « lieu de convivialité et de proximité » ni le camping comme un "espace de luxe et de volupté ».
Les Talent communities cherchent à étendre la relation entre entreprise et Talents au-delà des besoins en recrutement. Est-ce rentable ? Avez-vous parmi vos clients des exemples de success stories en la matière ?
Le phénomène est assez nouveau en France (pour ne pas dire embryonnaire). L’enjeu est pourtant intéressant. Nous avons passé des années à gérer une communication dont l’issue était noire ou blanche. D’un côté, une candidature, de l’autre, rien… au milieu, RIEN.
De plus en plus d’entreprises se posent la question de la proposition de valeur qu’elles peuvent faire à tous les candidats potentiels pour qui « ce n’est pas le bon moment ». Qu’il s’agisse du fait que l’entreprise n’a pas à ce jour d’offre pertinente à leur proposer ou qu’ils ne se sentent simplement pas prêts à quitter leur employeur actuel.
Les réseaux sociaux sont en cela une réponse intéressante, généralement le premier pas vers une possible Talent Community plus formelle.
Ces communautés demandent cependant une vraie implication dans le long terme, les animer représente un réel investissement sur le futur qu’il n’est pas toujours aisé de réaliser, surtout en décalage de phase, dans une période ou la communication employeur a vu ses budgets fondre comme neige au soleil.
Pour en savoir plus : Thomas Delorme, VP France Managing Director, TMP Worldwide / TMPNEO